La Chine surtaxe de 34% les Brandy Européens

Taxe chinoise sur l'importation des brandy européens

La guerre commerciale est déclarée entre Pékin et Bruxelles, emportant dans son sillage le vignoble dédié aux eaux-de-vie qui n’a rien à voir avec les conflits sur les voitures électriques… Annoncées comme provisoires, les taxes laissent craindre un engrenage inquiétant pour les opérateurs charentais et gascons, mais pas seulement.

Après une année 2023 déjà compliquée niveaux exportation, la filière vitivinicole française n’a pas plus de chance en 2024. Après une année climatique marquée soit par la sècheresse dans le sud soit par la grêle, le gel, le mildiou et les inondations dans le reste du vignoble, après des vendanges difficiles suite aux pluies de septembre et début octobre, voici qu’une crise commerciale s’invite afin de plomber un peu plus le morale d’une filière déjà bien dégradé.  

Mais qu’est-ce que le Brandy, la victime du jour ? Le brandy est un terme anglais qui tire son origine du terme néerlandais “brandewijn” qui signifie “vin brûlé”. Au sens large le brandy c’est une eau-de-vie – boisson spiritueuse – obtenue par distillation de macération de fruits, principalement le raisin. Au sens du  Règlement Européen, est considéré comme Brandy “toute boisson spiritueuse produite à partir d’eau-de-vie de vin – issue de la fermentation de raisin – qui titre à 36% volume minimum et vieillit pendant au moins 6 mois si la capacité du fût de chêne est inférieure à 1000 litres. Ensuite, chaque règlementations des Indications Géographiques Protégées (IGP) ou Appellations d’Origines Protégées (AOP) renforcent et compètent la règlementation.

Il y a  au sein de l’Union Européenne globalement que trois pays producteurs de Brandy, la France avec principalement le Cognac et l’Armagnac, l’Espagne avec le Jerez et les Brandy Italien. Mais la France représente environ 95% de la production de l’UE, il est peu de dire qu’elle est donc la principale victime des mesures de rétorsion Chinoise.

Depuis ce vendredi 11 octobre, la Chine impose des droits de douane supplémentaires de 34,8 % sur les importations de brandies européens avec de surcroît des cautions demandées aux importateurs chinois). Réponse directe au vote de la France en particulier et de l’Union Européenne en général sur l’imposition de droits de douane compensateurs ciblant les véhicules électriques chinois une semaine avant, ce vendredi 4 octobre, cette annonce chinoise balaie les promesses passées entre présidents de ne pas imposer de mesures provisoires dans le cadre d’une enquête antidumping opportunément ouverte le 5 janvier 2024.

« L’enquête chinoise a révélé que les importations de brandy en provenance de l’Union Européenne faisaient l’objet de dumping sur son marché, ce qui constitue une menace de préjudice important pour la branche de production nationale » rapporte le quotidien China Daily. Alors que les conclusions préliminaires de l’enquête semblent particulièrement légères, le dossier est vide pour la filière charentaise. « Il n’y a rien ! Un dumping est totalement surréaliste. Cela voudrait dire que l’on a 250 maisons de cognac qui se sont mises d’accord avec les maisons d’Armagnac, de brandies espagnols et italiens pour fixer des prix en Chine » réagissait récemment Florent Morillon, le président du Bureau National Interprofessionnel de Cognac (BNIC). Si une procédure devant l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC) est envisageable, elle n’empêche pas l’imposition de droits de douanes punitifs. Représentant 25 % des expéditions charentaises, le marché chinois devrait réduire considérablement sa consommation de cognacs, ce qui pourrait causer un effet domino dévastateur pour l’ensemble du vignoble français et de sa production de vins blancs. Ainsi que pour tous les fournisseurs et partenaires de la filière, déjà fragilisés par une crise touchant les vins rouges.

Comme l’ont montré les vins australiens (taxés à plus de 200 % de 2021 à 2024) ce qui entraîné l’effondrement des exportations vers la Chine et va abimer pour longtemps la filière viticole de ce Pays, les conflits commerciaux, on sait comment ils démarrent mais jamais quand et comment ils finissent. De quoi pousser les représentants d’Armagnac et de Cognac à appeler à une résolution diplomatique rapide du conflit dont les origines ne les concernent pas. Comme affirmé lors de rencontres avec les cabinets du premier ministre et du président de la République, ainsi que la ministre de l’Agriculture, « les autorités françaises ne peuvent pas nous abandonner et nous laisser seuls face à des rétorsions chinoises et qui ne nous concernent pas. L’effet de ces taxes serait catastrophique pour nos filières et nos régions » réagit un communiqué du BNIC ce 8 octobre à l’annonce de la surtaxe par la Chine, craignant « un cran de plus vers la taxation définitive des filières cognac et armagnac par la Chine ».

Et les producteurs français savent de quoi ils parlent, pendant la présidence de Donald Trump aux Etats-Unis, les vins Français ont connu une surtaxe alors que le conflit avec l’Europe concernait l’aéronautique. La filière a perdu des parts de marché qu’elle  a du mal à retrouver depuis.  

Cette fois-ci, il ne s’agit pas d’avions mais d’automobile.  Cette Annonce chinoise fait suite aux décisions européennes de surtaxer les voitures électriques importés par ce pays, cela « confirme la menace d’imposition de taxes définitives sur nos spiritueux, et cela dès que l’Union européenne aura officialisé ses surtaxes sur les véhicules électriques chinois, potentiellement fin octobre » alerte le BNIC, qui interppelle « notre gouvernement afin que les démarches nécessaires soient enfin entamées pour mettre fin à cette escalade dont nous sommes les otages et dont l’issue est aujourd’hui plus menaçante que jamais. Ces taxes doivent être suspendues avant qu’il ne soit trop tard. »

Cognac annonce la douleur : sans annulation des taxes chinoises, des manifestations auront lieu. « La France assume clairement le fait de n’avoir même pas cherché à repousser les échéances pour laisser place à la négociation » jugeait récemment Anthony Brun, le président de l’Union Générale des Viticulteurs pour l’AOC Cognac (UGVC), qui annonçait que « si aucun plan d’action précis ne nous est présenté, nous relancerons après les vendanges la mobilisation avec des actions à définir qui ne laisseront cette fois-ci pas le choix aux autorités que de changer leur posture irresponsable à notre égard ». Une première manifestation ayant mobilisé 1 500 participants et 120 tracteurs à Cognac à la veille des vendanges.

Les grands groupes sur le Cognac comme Moët Hennessy annonçait déjà -10% sur les ventes Cognac & Spiritueux déjà impacté par l’ouverture de l’enquête dès Janvier sur la Chine. Constat similaire chez Pernod Ricard -9% sur la croissance organique en Chine.

Le discours a beau être vigoureux par les responsables de la filière, le conflit a beau ne pas concerner les Brandy, l’Europe et la France sont mis dans un corner par les Chinois etre tenter de sauver l’automobile Européenne attaquer par la production Chinoise ou défendre la filière vitivinicole déjà bien malade. A suivre.

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